Dans les discours interreligieux et même dans la science des religions, l’interprétation selon laquelle Abraham serait le dénominateur commun des juifs, des chrétiens et des musulmans commence à être à la mode. Les trois « religions abrahamiques » auraient ainsi pour origine Abraham et auraient préservé, en tant qu’héritage, la croyance en un seul et même Dieu sous différentes lois religieuses. Le judaïsme, le christianisme et l’islam seraient donc apparentés et aspireraient à la fraternité.

Heinz Gstrein, Orientaliste

Cela est certainement vrai des juifs et des chrétiens. En revanche, le concept abrahamique d’une paix religieuse monothéiste ne s’applique pas aux musulmans. Dans la pratique, cela vient juste d’être démontré au mois de mars à travers le dernier événement majeur de l’abrahamisme erroné dans la patrie du patriarche de l’Ancien Testament, à savoir la visite du Pape à « Ur en Chaldée », l’actuel Irak. Des chrétiens et des musulmans s’y sont réunis pour une prière commune pour la paix. Mais les juifs, qui sont des descendants directs d’Abraham, n’y étaient pas représentés.

Les Juifs de Babylone y avaient pourtant joué un rôle important depuis leur exil biblique. Les Juifs ont survécu en Mésopotamie, même sous le règne des califes arabes et des sultans ottomans, jusqu’à ce que débute leur extermination avec la Seconde Guerre mondiale, comme partout ailleurs. Ensuite se sont succédé différents régimes arabes, jusqu’à celui de Saddam Hussein, qui ont veillé à ce que, sur les centaines de milliers de juifs irakiens, il n’en reste plus qu’une poignée. Pourtant, parmi ces derniers, pas un seul n’a pu aller voir le Pape à Ur ou n’a même été invité par les organisateurs musulmans …

Il n’y a là rien d’étonnant, car l’Abraham de l’islam, que le Coran appelle Ibrahim, n’est en rien identique à l’Abraham de la Bible. Considérant qu’il n’a aucun lien avec les juifs et les chrétiens, l’islam le considère comme un « païen » ayant cru en un Dieu unique et prétend qu’il a été le premier musulman. Cela est clairement formulé dans les sourates 3, 4 et 6 du Coran. Dans la sourate 2, Mahomet prétend même être le seul descendant légitime d’Abraham.

Abraham n’est pas Ibrahim

Par ailleurs, le récit biblique concernant Abraham et Isaac a été réécrit dans le Coran : Allah, le Dieu musulman, a mis la foi d’Ibrahim à l’épreuve en lui demandant de sacrifier son fils Ismaël que l’esclave Agar lui avait enfanté. Ce n’est donc pas, comme dans le judaïsme et le christianisme, le fils de la promesse, Isaac, qui a été choisi pour le sacrifice, mais Ismaël, le fils de l’esclave. Ibrahim aurait ensuite construit le sanctuaire de la Kaaba à La Mecque avec l’aide d’Ismaël. Le sacrifice d’Ibrahim est devenu le modèle du sacrifice rituel de la grande fête du Baïram, notamment au moment du pèlerinage à La Mecqe.

En outre, l’islam fait dire à Abraham/Ibrahim que les juifs et les chrétiens ne possèdent pas la vraie religion. Du point de vue de l’Islam, il ne peut donc être question d’un lien « abrahamique ». Il n’existe que dans l’esprit d’idéalistes interreligieux ou dans l’idéologie d’organisations islamiques de « façade », telles que le centre saoudien KAICIID (Centre international du Roi Abdallah ben Abdelaziz pour le dialogue interreligieux et interculturel), qui a été très controversé dès sa création. Ce dernier, qui avait, jusqu’à récemment encore, son siège à Vienne jouit désormais d’une visibilité hors d’Autriche. En 2020 déjà, des rumeurs évoquaient son transfert à Genève. Le ministère suisse des Affaires étrangères a confirmé à l’époque que la délocalisation de ce centre à Genève faisait l’objet d’un examen. Reste à espérer qu’il ne trouvera que peu de place en Suisse, tout comme les minarets et la burqa.

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