« L’être humain ne cesse de côtoyer la mort et endosse diverses attitudes afin de la rendre d’apparence moins brutale. Ces attitudes témoignent en général d’une humble reconnaissance de l’impuissance qu’il éprouve envers celle qui le prive si brutalement de son existence et le coupe de ceux qu’il aime. Mais nos contemporains en occident refusent toujours plus à vivre ‘en présence de la mort’, à s’y confronter par la pensée et envisager la vie comme un apprentissage de notre mort à venir. Il adopte à l’égard de la mort une attitude de fuite – c’est toujours ‘autrui’ ou ‘on’ qui meurt, comme aussi de maîtriser, afin de ne pas être déstabilisé par les questions existentielles qu’elle suscite. Ce désir de domination surgit de la peur de perdre une autonomie désormais comprise comme indépendance. (…) Plus grande est la détresse du moment, plus grand est le sentiment d’avoir perdu subjectivement sa dignité, plus grand aussi doit être alors l’affirmation de la dignité inaliénable de chaque personne. ‘Prendre soin’ implique de le confirmer dans son existence en soutenant qu’il est bon qu’il soit et qu’il continue à être. L’enjeu politique humaniste réside dans la mise en place de structures qui permettent d’accompagner l’être humain jusqu’à la fin naturelle se don existence, comme aussi d’une culture imprégnée d’espérance et qui permet que la vie est de l’ordre d’un don reçu. »

Bernard Schumacher, philosophe, Université de Fribourg.

Source: B. Schumacher, Mort et dignité : enjeux étiques et sociaux, Acta Medica Catholica Helvetica, 2/2017, S. 7-14.