Beaucoup le pensent. Pourquoi n’est-ce pas le cas en réalité ? Parce que l’islam et le christianisme entretiennent des rapports différents avec le pouvoir politique.
Amin Abdelmajid, E. Cazès, C. Bibollet
En Occident, on considère l’islam comme une « religion », au même titre que le christianisme. Sa raison d’être serait de proposer une relation entre l’homme et Dieu, basée sur une foi librement consentie et un culte privé, indépendant du pouvoir temporel. Rien n’est plus étranger à la réalité. L’islam est, en premier lieu, une gouvernance basée sur les lois coraniques avec ses tribunaux chargés de faire respecter ses lois et de condamner ceux qui y contreviennent.
Islam = Christianisme ?
Récemment, le quotidien 24Heures a relaté les débats internes à une association musulmane concernant la discrimination des homosexuels. Son auteure a affirmé que l’homosexualité était condamnée « dans l’islam au même titre que dans le christianisme ». Le caractère très simplificateur de ce propos entretient l’idée d’une profonde similarité entre islam et christianisme. Pourtant, dans les faits, la doctrine chrétienne sur ce sujet diffère de celle de l’islam. Si, dans la Bible, il est question de condamner à mort les homosexuels, il faut rappeler que cette prescription de l’Ancien Testament ne concernait que le peuple d’Israël.
Elle n’est donc pas valable aujourd’hui. En effet, dans le Nouveau Testament, ni Christ ni les apôtres n’ont instauré de législations, encore moins de tribunaux, chargés de condamner ceux qui violeraient les préceptes de la loi. Si l’apôtre Paul dénonce l’homosexualité, il ne prescrit cependant aucun châtiment. Et il y a une raison fondamentale à cela : Jésus n’est pas venu dans le monde pour fonder un État, avec ses forces de police, ses juges et ses tribunaux pour condamner ceux qui ne voudraient pas vivre sous son règne. Il a déclaré, sans ambiguïté possible, que son royaume n’était pas de ce monde. (Évangile de Jean 18 :36)
Islam et pouvoir politique
Il n’en va pas de même pour l’islam. Mahomet, de son vivant, a instauré un État, avec son armée ainsi qu’une législation et des tribunaux pour faire respecter les prescriptions du Coran. Le Coran étant considéré comme Parole éternelle et explicite de Dieu, ses prescriptions sont des lois divines valables en tout temps et en tous lieux. Aujourd’hui encore, les législations officielles des pays musulmans institutionnalisent ces lois divines. En ce qui concerne le Code civil et le statut personnel, les prescriptions coraniques sont appliquées dans leur sens littéral, telles qu’elles figurent dans le Coran. Les prescriptions à caractère discriminatoire contraires aux Droits de l’Homme et à l’égalité homme-femme illustrent ce fait de manière très concrète et médiatique. Pour ce qui relève du Code pénal, aussi bien dans les pays sunnites (Arabie, Yémen…) que chiites (Iran), on applique encore les châtiments que prescrit le Coran dans toute leur rigueur. Dans d’autres pays musulmans, la condamnation reste valable, mais l’emprisonnement ou de fortes amendes remplacent la peine capitale. Dans le cas de l’homosexualité, on voit bien que l’islam ne la dénonce pas simplement au plan des principes mais qu’elle fait l’objet de peines allant de l’emprisonnement à la peine capitale. Elle a une dimension politique.
Christianisme et pouvoir politique
Certains ne manqueront pas de rappeler que l’Église a, elle aussi, mené des guerres et instaurer des tribunaux (l’Inquisition) pour punir ceux qu’elle jugeait hérétiques. Il faut cependant remarquer qu’elle l’a fait en contradiction totale avec l’enseignement du Christ et des apôtres. Aucun texte du Nouveau Testament n’aurait justifié ses agissements. Historiquement, c’est au Moyen-Âge, soit mille ans après la mort du Christ, que l’Église, devenue une institution, a cédé à la tentation du pouvoir temporel avec toutes les violences qui ont accompagné son exercice. Lorsqu’au dix-neuvième siècle, elle a renoncé à ce pouvoir, l’Église s’est retrouvée dans une position qui, de ce point de vue, correspondait mieux aux enseignements du Christ. Les chrétiens, conformément aux préceptes de l’Évangile, peuvent vivre sous tous les régimes politiques aussi longtemps qu’ils leur est permis d’observer les deux commandements fondamentaux d’aimer leur Dieu et leur prochain comme eux-mêmes.
Islam et communautarisme
Dans l’islam, à l’inverse, pouvoir temporel et religieux forment un amalgame. Vouloir les séparer reviendrait à rejeter le Coran ainsi que l’enseignement d’Allah et de son Prophète Mahomet. Pour les musulmans, leur contexte politique doit donc être islamique et appliquer les lois coraniques afin qu’ils puissent vivre selon la charia (lois musulmanes), fondement de leur religion. Et dans les pays non islamiques, les plus pieux d’entre eux aspirent à constituer des communautés régies par la charia. Ils forment ainsi des sociétés parallèles dans leurs pays d’accueil. Chacun peut donc le comprendre : affirmer que l’islam politique ne représente pas l’islam authentique constitue une erreur fondamentale. L’islam a toujours été politique depuis son instauration par Mahomet au VIIe siècle. Et aujourd’hui, des mouvements tels que celui des Frères Musulmans œuvrent pour que l’islam s’impose en Occident comme la réalité politique qu’il est.
Source : www.iqri.org
Plus d’informations :