Un gynécologue de Courtai a été condamné à payer 100’000 euros de dédommagements aux parents d’un enfant handicapé parce qu’il les avait averti trop tard du handicap de leur fille les empêchant ainsi de procéder à l’avortement. En effet, les parents n’avaient été mis au courant qu’après la trentième semaine de grossesse alors que le gynécologue aurait pu attester la présence d’un risque élevé de handicap grâce à un test effectué à la quinzième semaine. Le gynécologue les avait renvoyés vers l’hôpital, où un autre médecin leur avait finalement annoncé que leur fille, aujourd’hui âgée de 9 ans, souffrirait d’une forme grave de spina bifida, une malformation au niveau du dos. La mère en était alors à sa 33ème semaine de grossesse. La fillette se déplace aujourd’hui en chaise roulante, elle est incontinente et souffre d’un retard mental.
Les parents ont entamé leur combat judiciaire deux ans après la naissance de leur enfant. Ils prétendent que s’ils avaient été avertis de l’handicap dont souffrirait leur fille, ils auraient opté pour l’avortement. Le tribunal de Courtrai avait déjà estimé que le gynécologue avait commis une erreur. La Cour d’Appel a désormais confirmé ce jugement.
Le gynécologue de l’hôpital, qui avait annoncé la nouvelle aux parents, a été acquitté. Pour l’avocat Thierry Vansweevelt, il s’agit d’un jugement important. « La loi sur l’avortement ne fait qu’une distinction entre l’avortement avant et après 12 semaines de grossesse. A partir de 12 semaines, l’interruption volontaire de grossesse n’est autorisée que si l’enfant souffre d’une maladie grave et incurable ou si la vie de la mère est en danger. Le loi ne prévoit aucun terme », dit-il. La sénatrice et gynécologue Marleen Temmerman (sp.a) a par ailleurs déclaré: « Je souhaite affiner la loi au cours de cette législature » (Institut européen de Bioéthique, 23 décembre 2011).
Cette condamnation est dans la logique de l’avortement reconnue comme un droit puisque priver quelqu’un de l’exercice de son droit est un préjudice indemnisable. Elle pose cependant la question de la preuve que la mère avaient réellement l’intention d’avorter si elle avaient su que sa fille allait naître handicapée. En outre, l’exercice de ce droit est aujourd’hui limité selon la gravité du handicap. Si ces conditions devaient être élargies ou tout simplement supprimées, n’importe quelle femme pourrait réclamer un dédommagement après une naissance en prétendant qu’elle n’est pas satisfaite de son enfant et aurait avorté si elle avait su. Cette perspective qui semble encore irréaliste ne l’est pas tant que ça car, si l’avortement est réellement considéré comme un droit des femmes, les conditions qui l’encadrent sont par définition sujettes à modification. L’avortement étant fondé sur la subjectivité de la femme contre le fait objectif de la vie de l’enfant, les conditions qui en limitent la pratique restent fragiles. (C. B. C.)
Correspondance Européenne 246/05