Le verdict tant attendu est tombé ce vendredi, en fin d’après-midi, heure française. La Cour suprême des États-Unis est allée jusqu’au bout et n’a pas plié sous la pression incessante de ses opposants des dernières semaines. Le célèbre arrêt de 1973, Roe v. Wade, jugeant le droit à l’avortement comme conforme à la Constitution américaine, vient d’être annulé par cinq sages contre quatre.

C’est donc un véritable tremblement de terre que vivent les États-Unis, tant, de France, il nous paraît impossible de revenir sur de pareilles lois sociétales. Il faut le dire, il s’agit bien d’une victoire conservatrice, attendue depuis de longues années. Désormais, la législation sur l’avortement reviendra donc uniquement à la discrétion des États.

Juges conservateurs menacés

Toutefois, le symbolisme de cette décision est tel que différentes conséquences sont à attendre. Déjà, depuis le 2 mai dernier et la « fuite » du document préparé par Samuel Alito, les juges conservateurs craignaient pour leur vie. Car, en plus des manifestations de groupes d’extrême gauche devant leurs domiciles personnels, les menaces se sont multipliées. Dans la nuit du 7 au 8 juin dernier, un homme de 26 ans a été arrêté à quelques pas de la maison de Brett Cavanaugh, dans le Maryland. Le Wall Street Journal, qui avait réussi à accéder au dossier judiciaire, révélait que parti de Californie, le jeune homme avait traversé le pays entier pour accomplir sa mission. Interpellé par des marshals, il portait sur lui « des armes, dont un Glock 17, deux chargeurs, des munitions, un couteau, du gaz poivré, un marteau, un tournevis, un pied de biche, des attaches zippées et du ruban adhésif ». Selon ses dires, il comptait assassiner le juge et se donner la mort ensuite. L’événement n’est pas à prendre à la légère, tant les propos violents à l’encontre des juges conservateurs et de leur famille circulent librement sur les réseaux sociaux. L’arrêt désormais officiellement invalidé, les analystes prévoient une escalade de rage pour l’été. La sécurité des juges sera donc un sujet majeur ces prochains mois.

De son côté, le président Joe Biden a tout de suite pris la parole, arguant que l’une des plus hautes juridictions de l’État « prenait une voie extrême ». Pour lui, la faute revient à son prédécesseur, Donald Trump, qui a nommé trois des juges républicains (Neil Gorsuch, Brett Kavanaugh et Amy Coney Barrett) ayant voté le démantèlement de l’arrêt de presque cinquante ans. Renversant totalement le narratif pour faire passer les conservateurs comme des bourreaux, le démocrate n’a pas eu peur de surjouer avec les arguments émotionnels habituels. Toutefois, pour Joe Biden, « ce n’est pas fini ». La solution reste que le Congrès contourne la Cour suprême et vote le droit à l’avortement comme loi fédérale…

Côté conservateur, l’heure est à la joie. La toute nouvelle représentante républicaine du Texas, Mayra Flores, réagissait sur Fox News : « C’est un rêve qui se réalise pour moi et le sud du Texas, où nous sommes pro-vie. C’est une grande victoire pour notre pays. Aussi, je crois que la raison pour laquelle nous avons tant de crimes aux États-Unis revient au fait que nous avons arrêté de respecter la vie. »

Quelles perspectives après ce jour historique ?

Pour le juge Clarence Thomas, âgé de 74 ans, assesseur de la Cour suprême depuis 1991, la Cour pourrait revenir également sur d’autre arrêts sociétaux, par exemple Obergefell v. Hodges de 2015, reconnaissant comme constitutionnel le mariage de même sexe. Le journal Politico prévoit, quant à lui, de possibles conséquences dans les « swing states » (États bascules) à l’aune des élections de mi-mandat, le sujet Roe v. Wade pouvant rejouer les cartes pour les démocrates en éclipsant les préoccupations actuelles sur le prix de l’essence ou l’inflation. À noter, également, la deuxième victoire du jour pour les « pro-life » : à six voix contre quatre, ce 24 juin, les sages votaient en faveur de la législation de l’État du Mississipi interdisant l’avortement à plus de 15 semaines de grossesse.

Source : www.bvoltaire.fr