La Suisse est un enfer pour les femmes, c’est un comité ad hoc réuni à Genève qui sonne l’alarme. La gouvernance mondiale prend les choses en main.
Pauline Mille
On a tous des images dans la tête. Des cartes postales, des poncifs. La Suisse, par exemple. Au Moyen Age c’était le pays des mercenaires, à la Renaissance ils ont pris du service dans les gardes pontificaux, ensuite on a connu les petits ramoneurs, et depuis qu’ils ont inventé le secret bancaire, c’était un pays peuplé de Toblerone et de vaches mélomanes, une idylle cossue des alpages. Eh bien on se trompait. La Suisse est le pays de la discrimination sexiste, un enfer pour les femmes, c’est l’ONU qui le dit, on s’en occupe à Genève, et croyez-moi les choses vont changer.
Au départ, il y a peut-être une embrouille entre la Suisse et l’ONU à propos de la réserve que la première (la Suisse) a faite sur le droit matrimonial à propos de la convention de la seconde (l’ONU) et qu’elle n’estime pas pouvoir lever avant 2050. A Genève, on se hâte vers l’égalité hommes-femmes, mais lentement.
La patronne de la délégation suisse a dû reconnaître que l’autonomie économique des femmes en Suisse est « encore incomplète » : elles n’égalent pas les hommes pour l’emploi, les salaires, les retraites. Une experte de l’ONU a demandé pourquoi la Suisse ne sanctionne pas les entreprises qui ne garantissent pas davantage de représentation féminine dans les postes dirigeants.
Mais tout cela n’est que de la petite bière. Deux sujets vraiment graves ont retenu en particulier l’attention des observateurs de l’ONU à Genève, et la Suisse a promis pour se racheter un comportement exemplaire. Le premier est le stalking. Vous ignorez sans doute de quoi il s’agit. Moi aussi. Je me suis renseignée sur Wikipedia. C’est une variété de harcèlement psychologique contre laquelle la Suisse ne protège pas suffisamment les femmes. Une sorte de traque furtive et obsessionnelle, souvent d’intention érotique. En un mot comme en cent, les femmes en Suisse reçoivent trop d’appels téléphoniques de personnes dont elles n’en souhaitent pas, on leur envoie trop de courriels accompagnés d’émoticônes sentimentales et de boîtes de Mon Chéri en dehors de la Saint Valentin. Il faut que cela cesse. Une étude est prévue en 2017.
L’autre point noir est la question des migrants. Ou plutôt des migrantes. Il va sans dire que la lutte contre toute discrimination en raison de la race ou de la religion est « une composante essentielle » du gouvernement suisse. Mais avec la « crise migratoire » et le « terrorisme », les voiles sont mal vus de Genève à Bern. L’ONU et ses ONG froncent les sourcils. Il ne faudrait pas que les femmes musulmanes soient « discriminées ». En même temps, l’organisation Terre des femmes Suisse déplore que la Suisse n’accorde pas spécialement le droit d’asile aux femmes persécutées pour leur sexe, par exemple celles qu’opprime le patriarcat. La combinaison des deux revendications satisfait l’amateur de bretzels, image apéritive du serpent qui se mord la queue : en somme, il faudrait ouvrir la frontière suisse aux femmes qui refusent le voile en pays musulman pour qu’elles puissent venir en porter un à Genève.
C’est délicieux, et il y a en Suisse des centaines de fonctionnaires et de bénévoles qui s’occupent de dicter à un pays souverain de nouveaux us, de nouvelles coutumes, une nouvelle morale, jusque dans le détail le plus méticuleux, faute de quoi ce pays se retrouvera au coin de la classe. La gouvernance mondiale n’est pas un projet : c’est l’ONU.
Source: Réinformation.tv