Depuis mon arrivée dans le canton de Vaud, un fait m’a frappée : la visibilité du deal de rue. Dans les gares, sur les passerelles, les dealers opèrent sans crainte, attendant les consommateurs. Plus surprenant encore, les municipalités tolèrent cette activité, préférant « contenir » le problème plutôt que l’éradiquer.
Léa Sauchay
Pourtant, la Suisse a déjà connu une crise similaire. Dans les années 80 et 90, Zurich avait vu son parc de la Platzspitz devenir un lieu de rassemblement pour toxicomanes. La situation sanitaire y était catastrophique : explosion des cas de VIH et d’hépatite, overdoses en série, insécurité croissante.
Face à ce désastre, la Confédération avait instauré une politique en quatre piliers : prévention, thérapie, réduction des risques et répression. Cette stratégie globale avait permis de stabiliser la situation, limitant les dégâts du trafic et de la consommation.
Une stratégie inefficace, inappliquée et désormais ignorée
La prévention visait à informer sur les dangers des drogues, surtout auprès des jeunes. La thérapie proposait des traitements adaptés, dont la méthadone pour les héroïnomanes, ainsi qu’un accès facilité aux centres de désintoxication. La réduction des risques introduisait des salles de consommation supervisée, réduisant la transmission des maladies. Enfin, la répression ciblait les trafiquants tout en évitant la criminalisation des consommateurs.
Grâce à cette approche, la Suisse était parvenue à reprendre le contrôle de la situation. Pourtant, aujourd’hui, face à la montée du crack, nos autorités tardent à réagir. L’histoire nous a pourtant montré les conséquences de l’inaction. À Berlin, dans les années 70, la crise de l’héroïne avait explosé en raison d’un laisser-faire politique. Comme à Zurich, la toxicomanie s’était étendue dans les gares et les rues, accompagnée d’une montée de la violence et de la marginalisation des usagers.
Un laxisme coupable face à une nouvelle crise
Le parallèle avec la Suisse actuelle est frappant. Partout, le deal prospère, l’insécurité grandit et l’emprise des réseaux criminels s’intensifie. Pourtant, les communes, majoritairement dirigées par des partis de gauche, refusent d’agir avec fermeté.
Sous prétexte de « garder un lien » avec les toxicomanes pour faciliter leur prise en charge, elles laissent le trafic s’enraciner. Mais ce n’est pas tout : les dealers, souvent liés à la mafia nigériane Black Axe, imposent leur loi. Ce réseau, actif dans la traite humaine et le crime organisé, exploite les failles de notre système.
Loin d’expulser ces trafiquants, certaines municipalités vont jusqu’à envisager une distribution régulée de cocaïne, à l’image de ce qui avait été fait pour l’héroïne. Mais cette mesure ne s’attaque pas au problème de fond : le contrôle du marché noir par des mafias étrangères. Pendant ce temps, la situation dégénère. Des jeunes sont ciblés, parfois en échange de services sexuels contre de la drogue. Certaines infrastructures sanitaires sont saturées, et des parcs deviennent impraticables à certaines heures.
Il est temps de tirer les leçons du passé. La politique des 4 piliers avait fonctionné parce qu’elle combinait assistance et fermeté. Or, aujourd’hui, le pilier répressif est délaissé, sous couvert d’idéologie.
Sans une action claire contre les réseaux criminels et un retour à une vraie répression du trafic, la Suisse risque de revivre un nouveau Platzspitz, avec toutes les conséquences humaines et sociales que cela implique.
Source : www.lesobservateurs.ch